Bien aimés du Seigneur,
En ces trois derniers dimanches de l'année liturgique, l'évangile qui nous est proposé est tiré du chapitre 25 de saint Mathieu. Dans ce chapitre, sont rassemblées trois paraboles de Jésus sur la fin des temps : le récit des dix jeunes filles, la parabole des talents et celle du jugement dernier. Chacun de ces textes reprend avec insistance l'exhortation du Christ à la vigilance : "veillez, car vous ne savez ni le jour, ni l'heure." Nous sommes tous invités à demeurer éveillés dans la foi et la prière pour ne pas être surpris par la venue du Seigneur, un événement dont nous ne pouvons prévoir ni la date ni les circonstances. Il viendra à un moment, où peut-être nous ne l'attendons plus, comme les vierges dont parle l'évangile de ce jour.
Des noces un peu particulières
Quelle curieuse parabole, en effet ! Tout dans ce récit paraît si étrange. Comment expliquer, par exemple, ce refus énigmatique des vierges sages de partager leur réserve d'huile avec leurs compagnes moins prévoyantes ? Quelle est cette mystérieuse lampe qui ne peut éclairer qu'une seule personne ? Pourquoi les vierges insensées ne peuvent-elles pas profiter de la lumière des autres ? On sait pourtant qu'une petite lumière, aussi tenue soit-elle, suffit pour guider plus d'une personne. Comment surtout comprendre la sévérité excessive de l'époux qui renvoie les vierges ''insensées" de manière si impitoyable ? Quels sont, en définitive, les enseignements que le Christ nous livre à travers cette parabole ? Moi personnellement j'en tire six.
Première annonce : le royaume des cieux est un festin de noces
Si Jésus raconte cette parabole ce n'est nullement pour terrifier ses auditeurs, mais pour leur annoncer une heureuse nouvelle : Dieu aime l'humanité comme l'époux aime son épouse. Cet amour de Dieu pour l'humanité est patente dans le livre du prophète Osée au chapitre 2, 21-22 : " Je te fiancerai à moi pour toujours ; je te fiancerai dans la justice et le droit, dans la tendresse et la miséricorde ; je te fiancerai à moi dans la fidélité, et tu connaitras le Seigneur ". Pour sceller cette alliance avec l'humanité, Dieu a préparé un festin auquel nous sommes tous conviés.
Deuxième annonce : nul ne connaît le moment où l'époux viendra
Cette exhortation est répétée dans les trois paraboles de la fin des temps :" Veillez, car vous ne connaissez pas le jour où le Seigneur viendra "
Troisième annonce : apprendre à gérer sa foi dans la durée
Il ne suffit pas d'être invités ou de se mettre en route ; il importe également de tenir jusqu'au bout et d'être ponctuels au rendez-vous, grâce à la persévérance dans l'attente. Les jeunes filles étaient vaincues par le sommeil et se sont assoupies, cela signifie qu'il est humainement impossible de rester constamment éveillé. A un moment ou à un autre, le sommeil finit par avoir raison de nous. L'attente ne consiste donc pas à ne jamais s'endormir mais à prendre toutes les dispositions nécessaires pour que même en cas d'assoupissement la venue de l'époux ne nous prenne pas au dépourvu. Il nous faut nous prémunir contre le risque de la lassitude en restant éveillés dans la prière, la foi et l'espérance. D'où l'importance de garder sa lampe allumée.
Quatrième annonce : faire une bonne provision d'huile
Quelle est cette huile mystérieuse dont les vierges sages ont fait une bonne provision ? L'huile de l'amour, de l'espérance, de la foi, de la charité et surtout l'huile des bonnes œuvres. Alors, face aux multiples tempêtes, aux nombreuses tentations du monde de notre temps, efforçons-nous de faire briller la lumière de la persévérance, de la miséricorde et de l'amour.
Cinquième annonce : vivre l'instant présent
L'agitation et la frénésie qui s'emparent à la dernière minute des vierges imprévoyantes ne changent rien à leur désarroi. Fermée dès l'arrivée de l'époux, la porte ne se rouvrira plus. Il ne sert à rien de s'agiter alors qu'il est trop tard, puisque le temps ne peut plus se récupérer. Il faut plutôt savoir le saisir lorsqu'il nous est offert par Dieu. C'est une telle importance de l'instant présent que soulignait sainte Thérèse de l'Enfant Jésus lorsqu'elle écrivait : " Ma vie n'est qu'un instant, une heure passagère. Ma vie n'est qu'un seul jour qui m'échappe et qui fuit. Tu le sait, ô mon Dieu ! pour t'aimer sur terre, je n'ai qu’aujourd’hui !... "
Sixième annonce : on partage ce qu'on a ; on ne partage pas ce qu'on est
Chers amis, il existe certaines choses que l'on ne saurait partager, simplement parce qu'elles font partie de l'être même de la personne C'est dans ce sens qu'il faut comprendre le refus des vierges sages de partager leur huile avec leurs compagnes imprévoyantes. Comment, en effet partager sa fidélité, son honnêteté, son amour avec d'autres si ce n'est à travers l'exemple qu'on leur donne ?
A la fin des temps, dit Jésus, le paysan séparera le bon grain de l'ivraie ; pourtant les deux auront poussé dans le même chant. De même, le pêcheur séparera le bon poisson des déchets ramassés par le filet ; pourtant l'un et l'autre proviennent des mêmes eaux. Le berger séparera les brebis des chèvres ; pourtant elles font partie du même troupeau. Deux hommes seront au champ, l'un pris, l'autre laissé, deux femmes seront au moulin, l'une prise, l'autre laissée.
Chers amis, nous voilà avertis, à nous de jouer à la vigilance pour accueillir l'époux qui vient sans tarder. Amen !